Le saviez-vous ?
Avec le "Recombinant Antibody Challenge", le PETA Science Consortium International e.V., le Physicians Committee for Responsible Medicine et l'Alternative Research and Development Foundation subventionnent l'achat d'anticorps recombinants pour la recherche. N'hésitez pas à vous renseigner sur ce programme.
Synthétiser des anticorps sans utiliser d'animaux
Les avancées technologiques permettent en principe depuis plus de 20 ans de remplacer les anticorps d’origine animale par des anticorps recombinants. Le recours à ces anticorps entièrement produits in vitro réduirait de façon importante le nombre d’animaux utilisés dans les laboratoires, tout en facilitant le travail de recherche. Pourtant, cette technologie peine encore à s'imposer dans les laboratoires de recherche.
Anticorps d'origine animale : quand variabilité affecte reproductibilité et robustesse
Les anticorps utilisés en recherche - y compris dans les expériences in vitro considérées comme alternatives - sont encore majoritairement produits par le processus d'immunisation d’animaux de différentes espèces, qui conduit au sacrifice estimé de 1 million d'animaux par an dans l'Union européenne. Ce mode de production génère des anticorps polyclonaux avec une grande variabilité de spécificité et de sensibilité car chaque "lot" est unique. Les anticorps produits sont peu fiables, avec 50% des anticorps commercialisés qui ne reconnaissent pas leur cible ou ne sont pas spécifiques (Baker, 2015 ; Bradbury et al., 2015). Cet état de fait affecte directement la qualité de la recherche avec une difficulté majeure à générer des résultats robustes et reproductibles. Cela a aussi un impact conséquent pour les laboratoires en termes de temps, de budget et de ressources, mais également pour la santé publique.
Opter pour des anticorps synthétiques : un choix de recherche responsable et éthique à portée de pipette
Les anticorps recombinants, par essence monoclonaux, sont la réponse à ce besoin de stabilité et de contrôle qualité absolu : la facilité à générer ou reproduire des anticorps de façon synthétique (il suffit d'une séquence ADN), leur plasticité (nombre de chaînes, "espèce" des chaînes constantes et variables etc), mais surtout leur parfaite reproductibilité (séquence immuable et séquençage systématique) en font un outil de choix qui s'adapte parfaitement à la rigueur exigée par les expériences scientifiques. Au delà des applications de recherche, les anticorps recombinants sont utilisés avec succès à des fins de diagnostic et thérapeutiques. Le rôle de l'Ipilimumab - un anticorps recombinant - dans le traitement du mélanome métastatique, a ainsi été récompensé par le Prix Nobel de médecine en 2018, ouvrant de toutes nouvelles perspectives d’immunothérapie pour le traitement de pathologies variées.
Rendre les anticorps recombinants accessibles à la communauté scientifique
En 2014, Pierre Cosson et son équipe ont ouvert à Genève une plateforme universitaire afin de proposer l’accès à la technologie des anticorps recombinants aux laboratoires de recherche fondamentale du monde entier. Ce centre a découvert et produit des centaines de nouveaux anticorps monoclonaux recombinants par "phage display", référencé de façon exhaustive les anticorps découverts à ce jour, et créé une revue scientifique sur la recherche, la production et l'implémentation des anticorps recombinants : "Antibody Reports". Cette base de données est désormais associée à un centre de production in vitro qui commercialise tous ces anticorps à l’international : ABCD Antibodies.
-
Pierre Cosson
Diplômé de l'École Normale Supérieure, Pierre Cosson a effectué sa thèse de doctorat au centre d'Immunologie de Marseille-Luminy (France), puis un postdoc au NIH (USA). Il est désormais professeur et chef de laboratoire à la Faculté de médecine de l'Université de Genève. Pierre Cosson a fondé la plateforme "ABCD Antibodies", ainsi que le journal scientifique "Antibody reports". Il a également présidé le Conseil Scientifique du Centre 3R Suisse (3RCC) de 2019 à 2021.
Une transition plébiscitée par l’Union européenne
Au sein de l’Union européenne, l’application et le respect de la Directive 2010/63/EU voudraient que les états membres n’autorisent plus le développement et la production d’anticorps par immunisation d’animaux en l’absence d’une justification scientifique solide et légitime. Hors, de nos jours, l’existence, la disponibilité et la robustesse des anticorps synthétiques met à mal les différents arguments en faveur des anticorps d’origine animale. L’EURL ECVAM recommande ainsi depuis 2020 d’abandonner l’utilisation d’animaux pour le développement et la production d’anticorps pour la recherche, le diagnostic et les applications réglementaires et thérapeutiques, au bénéfice des méthodes de production alternatives in vitro. Une recommandation adaptée au paysage de la recherche française a été publiée fin 2022 par le Comité national de réflexion éthique sur l'expérimentation animale (CNREEA) : Avis sur l'utilisation d'anticorps d'origine animale ou non-animale.
Opter pour des anticorps recombinants lorsque cela est possible, c'est faire le choix d'une méthode innovante, fiable et robuste, tout en réduisant l’utilisation d’animaux dans la recherche.
Autres fournisseurs : Abcalis, Abcam, Absolute Antibody, Bio-Rad.